Page de carnet pour célébrer l’été

Le 21 juin 2012

« On commence à vieillir quand on a fini d’apprendre »
Proverbe japonais

Suite à une passionnante conversation virtuelle entamée hier sur le blog Patpantin de mon amie haijin Monique Mérabet autour des « chemins d’écriture » et notamment de ceux qui mènent aux haïkus, j’ai passé une bonne partie de la soirée à façonner des tercets qui cherchent à s’approcher du haïku. Ce ne sont pour le moment que des tercets, glissés sur des pages de carnet. Je les laisse reposer, je prends le temps de la métamorphose pour les ciseler un jour en véritables haïkus. En attendant, ils célèbrent la venue de l’été :

Après la tempête
Tiges brisées des roses trémières
Toute premières fleurs de dahlia

***

Acrobaties
Des hirondelles
Un cirque dans le ciel

***

Dans le crépuscule
Du jour le plus long
Le parfum des fleurs

***

Dans la paille froissée
L’oeuf unique
Du premier jour d’été

***

Solstice estival
Jusqu’au bout de la lumière
La peau dans le jour

***

Pour en revenir à la discussion sur Patpantin, j’avais glissé à la fin d’un de mes commentaires indiquant mes difficultés sur le chemin du haïku, ce petit tercet :

A peine je pense l’effleurer
Que déjà il s’est envolé
Papillon le haïku

Après avoir lu les différents commentaires et relu des haïkus sur le blog de Monique mais aussi sur les blogs de ses lecteurs, j’ai « élagué » (comme dit Monique) ce tercet pour en faire :

Papillon ? Haïku ?
A peine effleuré
Déjà il s’envole !

Mais entre temps, Monique en petite abeille, avait déjà mené « l’élagage » bien plus loin et réellement sublimé mon texte, la chenille est en quelque sorte devenue papillon :

à peine effleuré
le papillon s’envole
– mon haïku

Et voilà, un haïku à quatre mains est né à l’orée de l’été et à des dizaines de milliers de kilomètres et quelques fuseaux horaires de distance ! Je le conserve avec émotion dans mon carnet ! Merci Monique !



15 grains de pollen to “Page de carnet pour célébrer l’été”

  1. Monique dit :

    Bonsoir Patricia

    J’aime beaucoup cette page tensaku. Partager les haïkus de l’autre, les commenter, donner une piste pour les améliorer, c’est du pur bonheur.
    Je suis très touchée par l’appréciation que tu portes sur le haïku papillon que j’ai proposé.
    Pour ta version qui commence par « Papillon? Haïku?…. » je pense que d’associer les deux mots, c’est encore trop orienter le lecteur en lui imposant cette comparaison. Je crois que l’apparentement se fait de lui-même et c’est pour cela que j’ai dissocié les deux. Et puis, si n veut rester dans le concret (le propre d’u haïku) il vaut mieux évoquer le (vrai) papillon qui s’envole (vraiment). Comme dit Monika sur Patpanin, il faut faire confiance au lecteur. Et d’ailleurs, s’il ne comprend pas exactement ce que ressent l’auteur, il faut accepter cela aussi: cela fait partie de l’interactivité nécessaire.
    Mais que je suis bavarde!
    Pour tes autres haïkus d’été, je ten parle plus tard et plus longuement. Les trois derniers me plaisent bien.

    • Mariposa dit :

      Ah Monique, j’apprends beaucoup avec toi en quelques jours ! Je ne connaissais pas le terme « tensaku ». Une petite recherche google et voilà pour ceux qui comme moi aime lire des haïkus et souhaiterait pouvoir en écrire aussi, toujours sur le chemin de l’apprentissage et de la poésie : http://575.tempslibres.org/aphp/page3.php?page=v03n1p09
      Le haïku est décidément une démarche passionnante !
      Je suis d’accord avec toutes tes remarques, ce pour quoi d’ailleurs j’ai retenu la version que tu m’as proposée pour mon haïku. Peut-être le modifierai-je à nouveau un jour, plus tard, quand je me sentirai plus sûre de ma plume de future haijin, mais pour le moment, je le trouve superbe ainsi, merci !
      Je suis contente que les trois derniers haïkus d’été en particulier te plaisent, ce sont les derniers que j’ai écrits dans la soirée. J’ai retranscrit ici mes textes dans l’ordre dans lequel je les ai écrits. Peut-être mon écriture s’est-elle légèrement améliorée en cours de soirée ?
      A très bientôt ici ou sur Patpantin !

  2. Claire-Lise dit :

    J’ai lu avec beaucoup d’intérêt la métamorphose de ton haïku ! La version de Monique est, je trouve, la meilleure.

    Le haïku est une pratique difficile.

    Je caresse depuis longtemps le projet de publier un recueil de textes courts (poèmes de 2 ou 3 lignes dans l’esprit des haïkus). Mais j’ai aussi des progrès à faire sur cette voie.

    Parmi tes haïkus, j’aime surtout ceux-ci :

    Solstice estival
    Jusqu’au bout de la lumière
    La peau dans le jour.

    Acrobaties
    Des hirondelles
    Un cirque dans le ciel.

    Peut-être que j’aurais écrit le dernier différemment :

    Spectacle dans le ciel
    Lees acrobaties des hirondelles.

    • Mariposa dit :

      Moi aussi je trouve que le tensaku final à quatre mains avec Monique est le plus beau et je le conserve précieusement, d’autant plus qu’il est empreint de cette belle histoire d’écriture à quatre mains !
      Monique m’a également envoyé des suggestions-corrections concernant mes haïkus d’été. Vos remarques à toutes les deux se complètent et je ferai bientôt une page tensaku avec le résultat de notre travail à six mains.
      Concernant le haïku sur les hirondelles, Monique m’a fait deux remarques très juste :
      – D’une part « acrobaties » est redondant avec « cirque » ;
      – D’autre part, la ligne 3 (« Un cirque dans le ciel ») ferme le haïku en disant au lecteur quoi penser
      Ta suggestion est donc un bon départ pour une réécriture et la ligne 2 que tu me proposes est celle que je me suis déjà marqué dans mon carnet en ligne 3 avec une idée de reformulation mais en attendant de la retravailler. Je me demande cependant si dans ta suggestion « spectacle » n’est pas à nouveau redondant avec « acrobaties » ? C’est très subtil et j’ai un peu de mal à apprécier la redite ou pas ? Qu’est ce que tu en penses ?

  3. Claire-Lise dit :

    Je ne suis pas une spécialiste du haïku. Mais je ne pense pas que spectacle et acrobaties soit redondant.
    Il faut bien dire à quoi te font penser les acrobaties des hirondelles si on veut garder l’esprit de ton haïku.

    Spectacle dans le ciel
    Acrobaties des hirondelles. (je pense qu’il faut supprimer Les)
    me semble pas mal.

    Ou aussi :

    Acrobaties
    Dans le ciel
    Spectacle des hirondelles.

  4. Claire-Lise dit :

    J’ai oublié de dire que le tensaku me semble très intéressant.
    Dans le recueil « La lune dans les cheveux », Isabel avait reformulé mon haïku et j’avais beaucoup aimé sa reformulation.
    Quand on a écrit quelque chose, on a souvent du mal à l’écrire autrement. Plus on cherche, moins on y parvient et on perd parfois beaucoup de temps pour rien.
    Mais quand on lit un texte qu’on n’a pas écrit, on voit mieux ce qui pourrait être amélioré.
    Pour le haïku, l’exercice est vraiment intéressant surtout pour ceux qui débutent ou cherchent à progresser dans cette voie.

    • Mariposa dit :

      Tout à fait d’accord avec toi ! Pour « La lune dans les cheveux », mon haïku a fait l’objet de nombreux et longs échanges avec isabel et j’avais trouvé ça particulièrement intéressant. Cela me galvanise donc que Monique et toi mettiez votre petit grain de sel (ou de pollen) dans mes balbutiements de haijin !
      Il faut de la distance et du recul dans l’écriture. Je pense que pour le haïku en particulier travailler ainsi sur le rythme du tensaku est très « fertile » (je ne vois pas comment le dire autrement !!!). Ou alors il faut écrire des premiers jets. Les laisser mariner dans leur jus. Laisser passer un ou deux ans et les redécouvrir/réécrire comme si on n’en était pas l’auteur premier. Cela m’arrive de le faire avec des poèmes écrits plusieurs années auparavant, qui ne me plaisaient pas dans leur forme de départ et que j’ai fait aboutir plus tard.

  5. Monique dit :

    Bonjour Patrica et Claire-Lise

    Pasionnante cette page de tensaku. Je rajoute mon garain de sel…. Peut-petre les hirondelles sont-elles commme les moineaux qui s’attrapentn dit-on en leur mettant un grain de sel sous la queue!!!!!!
    Je reprends ladernière version de Claire-Lise… en supprimant le mot spectacle qui est bien inutile. Acrobaties cela suffit pour évoquer le spectacle auquel on assiste. Ce qui donnerait:

    acrobaties
    dans le ciel
    – les hirondellles

    ce qui correspond bien à celui de Patricia. Non?
    Maintenant si on veut l’étoffer un peu, je suggèrerai plutôt de préciser en L2, le lieu ou la saison…
    Vive le haïku! et les hirondelles!

  6. Monique dit :

    Pardon pour les coquilles.

    • Mariposa dit :

      J’aime assez ta version Monique !
      Il m’en est venu une autre, je t’en parlerai en réponse à ton mail d’aujourd’hui puis je ferai un billet pour récapituler le travail fait à six mains !
      Oui c’est passionnant ! Les hirondelles m’inspirent beaucoup actuellement car tous les soirs elles sont là à mon retour du travail à tournoyer au-dessus des vignes et elles font en effet des acrobaties spectaculaires, souvent en frôlant mes fenêtres, et ce, toute la soirée ! Un vrai régal avec les journées étirées du début d’été …

  7. Claire-Lise dit :

    Bonjour Monique

    J’ai également été passionnée par cet échange.
    J’ai encore beaucoup à apprendre en matière d’écriture de haïkus et je trouve que

    « Acrobaties
    dans le ciel
    les hirondelles »

    est parfait.

    C’est vrai que spectacle n’ajoute rien de plus.

  8. Mariposa dit :

    Nous avons tous à apprendre tous les jours Claire-Lise ! Et c’est vrai que c’est dur d’avoir du recul sur son propre travail. L’une des difficultés du haïku pour nous poètes d’écriture occidentale est d’apprendre à se défaire du superflu alors qu’on nous a appris à enjoliver !
    Je me rappellerai toujours de mes cours de français au primaire puis de lettres au collège et au lycée où instituteurs et professeurs me disaient souvent que c’était bien mais qu’il fallait que je développe ! On nous a appris à étaler sur 4 ou 6 pages ce qu’on pouvait très bien écrire en 2 pages !
    Et lorsqu’on se met devant une page blanche pour écrire des haïkus, il faut repartir avec l’esprit neuf, comme un enfant. Pas simple …

  9. Monique dit :

    Une réflexion en entraîne une autre…
    Je ne crois pas que notre apprentissage scolaire à développer notre expression soit nocive à la production de haïkus. Comme souvent dans la vie, qui peut le plus peut le moins. Une culture poétique classique donne du recul. Et puis, l’écriture « minimaliste » qui sied a un haïku doit être choisie et non pas se mettre en place à cause d’une carence de vocabulaire par exemple.
    Tu parles de se mettre devant sa feuille ‘comme un enfant », Patricia. Oui, pour le regard. J’ai animé des ateliers haïkus avec des enfants de tous âges et leur faire aboutir à un haïku demande un gros travail de recherche de vocabulaire ou d’images qui sont nécessaires à l’expression de ce qu’ils veulent raconter.

    • Mariposa dit :

      Non je ne pense pas que ce soit nocif Monique. C’est juste que cet apprentissage – pour ma part en tout cas – entraîne certains presque automatismes de développement et que lorsque je me dis que je vais écrire un haïku, il me faut vraiment passer dans un autre univers, franchir une « frontière » invisible entre deux cases de mon cerveau. Deux façons de penser et d’observer le monde.
      Oui, bien sûr, je pensais au regard et à l’esprit neuf de l’enfant, « perméable » à tout nouvel apprentissage, avec cette soif particulière que l’on a en découvrant de nouvelles choses dans nos toutes premières années. Après en pratique, je me doute que faire écrire un haïku à un enfant ne doit pas être simple. Mais je suis certaine par contre qu’au cours de ces ateliers tu as dû être agréablement surprise par la spontanéité de ce qu’ils écrivaient !
      J’admire souvent les images dans les poèmes d’enfant. C’est à la fois d’une simplicité et d’une évidence ! Mais avec la perte de l’innocence, on perd parfois un peu de ça aussi : la simplicité.

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