Papillons de mots

« Nullipare … et alors ! »

Causette Mai 15Couverture Causette n°56 – Mai 2015

Cela fait bientôt deux ans que j’achète régulièrement le magazine Causette avec lequel je passe de très bons moments. Au fil de ces mois, je me demandais si j’y trouverais un jour un article sur le non-désir d’enfant. Je pensais même envoyer un mail à la rédaction pour leur proposer d’aborder ce thème (en même temps, le magazine existait déjà depuis plusieurs années quand j’en suis devenue lectrice et je ne pouvais pas être sûre que le sujet n’avait pas déjà été abordé) …

Alors, ce mois-ci, quelle joie en allant chercher mon magazine chez ma buraliste et en m’apercevant qu’un dossier complet était consacré aux nullipares, à savoir aux femmes n’ayant jamais accouché, en particulier aux nullipares par choix, mais pas que. Le dossier donne aussi la parole aux femmes infertiles et aux mères non porteuses (adoptives). Le dossier va ainsi dans le même sens que le site « Femmes sans enfants » de Catherine-Emmanuelle Delisle (citée dans le dossier de Causette) auquel j’avais accordé un entretien-lecture il y a quelques mois.

Je suis ravie d’entendre, de voir, de lire de plus en plus d’articles, de reportages, de témoignages sur les femmes sans enfant par choix. Je suis ravie de voir le sujet intéresser les médias et la parole se libérer. Une fois de plus, je me suis souvent reconnue dans les déclarations et témoignages.

Edith Vallée indique que parmi les femmes sans enfant par choix, il y a les « grandes amoureuses » pour lesquelles le couple est une union totale qui ne laisse aucune place à un enfant, les « créatrices, chercheuses » qui se consacrent entièrement à une oeuvre et les « âmes rassembleuses » qui vivent l’engagement associatif, militant, politique comme un foyer. Je pense être un joyeux mélange des trois ! Mais d’abord et avant tout, tout comme Mélanie, il s’agit pour ma part d’une « absence d’envie ».

Source de l’image

Et puis, il y a eu ces phrases comme un coup de poing au milieu de l’article. Un aspect de cet état de nullipare auquel je n’avais pas pensé auparavant :
« Ce qui différencie femmes et hommes reste la maternité. Une femme qui ne veut pas d’enfant trouble l’organisation sociale. Elle ne respecte pas l’assignation qui la différencie des hommes. »
Charlotte Debest, sociologue.

Cela résonne très fort non seulement dans mon histoire de femme sans enfant, mais dans mon histoire tout court. Alors, j’ai pris ma plume de nulligeste et j’ai écrit ce texte :

Bouquet de mauve

Mariage entre cyan et magenta
Mariage entre chaud et froid
Mariage entre masculin et féminin

Mauve, tendre couleur métisse que je porte à fleur de peau
Mauve, trouble couleur androgyne qui m’enrubanne le corps

Giron plein, unique frontière entre homme et femme
En ceinturant mon ventre je gomme la séparation
Et je porte haut mon obi mauve

Mariposa, Barsac, 2 mai 2015

Ventres, sons creux
Poèmes de Patricia Grange
Illustrations de Maya Mihindou
Ed. Vertébrale, 2013

Lorsque mon recueil Ventres, sons creux a été publié fin 2013, je pensais que j’y avais écrit tout ce que j’avais à dire sur le sujet et que je ne reviendrais plus dessus. Comme quoi, on ne peut présager de rien. Mais je ne ferai pas de suite ni d’édition augmentée de ce recueil. Par contre, je pense intégrer ce nouveau poème à mes travaux en cours sur le corps des femmes.

Ventres, sons creux est toujours disponible.

Et puisque je vous ai parlé de Causette, sachez que ce magazine, qui vient de recevoir le prix du Magazine Passion de l’année, traverse des difficultés financières et a besoin de notre soutien.

Quitter la version mobile