Pirogue sur la Route des Pêches, Bénin, septembre 2005
(entre Cotonou et Ouidah)
Photo : Mariposa
D’ici quelques jours, je serai de retour à Cotonou, au Bénin.
La ville où je suis née, la ville où j’ai grandi, la ville de mon enfance et de mon adolescence, la ville de mon premier cri, de mon premier souffle, de mes premiers poèmes.
Après neuf ans d’absence. Mon dernier séjour date d’avril 2007.
Neuf ans. Toute une vie. Tout un cycle.
La dernière fois que je suis partie au Bénin, j’avais tout juste entamé ma vie de jeune active, je n’avais pas encore réellement replongé dans la création poétique. A cette époque, la poésie était simplement devenue un exutoire, le journal de mes états d’âme. J’entamais ma vie de jeune femme avec des rêves et des projets bien loin de ceux qui m’habitent et me meuvent aujourd’hui.
La dernière fois que je suis partie au Bénin, j’entamais un nouveau cycle dans ma vie. Aujourd’hui, je viens de clore ce cycle et j’en entame un autre. Un joli symbole donc, à l’orée de cette nouvelle naissance, que d’aller reprendre énergie et souffle aux sources telluriques de mon commencement.
Je suis très émue et impatiente. J’ai également quelques craintes. En effet, si au cours de ces 9 ans écoulés, ma vie a subi diverses mutations, il en va forcément de même pour ce pays, pour le Bénin. Il ne m’a pas attendue et vit sa vie. Depuis 9 ans, je le regarde de loin, je l’ai idéalisé sur certains points, je l’attends au tournant sur d’autres. Et que vais-je découvrir ? Allons-nous nous reconnaître lui et moi ?
Beaucoup d’émotions en perspective. D’autant plus qu’au cours de mon séjour, je vais être en représentation pour la toute première fois sur cette terre de mon alpha :
En effet, à l’invitation de Patrice Toton et de l’association Katoulati, je vais participer à la 5ème édition des Rencontres Internationales des Arts de l’Oralité (RIAO) qui ont lieu sur une quinzaine de jours, du 2 au 12 novembre, dans plusieurs villes du pays. J’interviendrai pendant la première semaine et je présenterai mes lectures sonores Cotonou sur Garonne et Métisse. Et alors ?
Comment vous dire à quel point j’ai hâte de vivre ce « retour au pays natal » ? J’espère entrer en résonance avec le public béninois et vivre de jolis moments en communion avec les autres artistes.
Nul doute aussi que ce séjour nourrira mes futures créations poétiques et artistiques. Je ne pars pas avec un carnet de voyage comme lors de mon séjour en Malaisie. Je ne me fixe aucun objectif d’écriture ou de création. Je souhaite juste vivre pleinement ce retour et les RIAO. Et si la Poésie vient me toucher pendant ces prochains jours, si elle me demande de la coucher sur le papier, je lui accorderai ma voix et les baisers de ma plume.
Je vous laisse avec mon poème Koutonou (Cotonou) qui fait partie de ma lecture Cotonou sur Garonne :
Koutonou
Cotonou !
Ca sonne comme un tam-tam
Au rythme éreintant
Des voitures qui plongent dans la boue
Et nagent dans les trous !
Cotonou !
Piaillement des klaxons
Cascade jaune et folle
Des zémidjans* !
Cotonou !
Jet soudain d’urine
Contre un mur
D’une femme lubrique !
Cotonou !
Litanies de mendiants
Egrenant leurs chapelets
De salamalecs !
Allah soumilaï laï !
Cotonou !
Assaut verbal et criard
Des journaux
Brosses bonbons
Serpillières comprimés
Aux feux rouges !
Cotonou.
Défilé bariolé
Des marchandes
Souffle épicé
De la chaleur
Du cœur.
Cotonou.
Sauts de joie
Des vagues
Accueil ombragé
Des cocotiers
Caresse du sable.
Cotonou.
Sourire d’un enfant
Talé-talé** sucrés
Douceur paisible du soir
Ah ! Cotonou …
Patricia Houéfa Grange
Tous droits réservés
*zémidjan : littéralement « emmène-moi vite » en langue fon. Taxi-moto, vêtu d’une chemise jaune.
**talé-talé : beignet de banane
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