Il y a quelques jours, je vous ai présenté mon projet Capillotractée et en particulier le travail réalisé pour l’expo Ni muses ni soumises : artistes ! organisée par la Macla dans le cadre de la Quinzaine de l’égalité.
Je viens aujourd’hui vous en dire un peu plus sur le Triptyque Afrolatinas qui est donc actuellement exposé au Zig Zag Café.
Pourquoi ces trois femmes ?
Ce sont trois femmes engagées, féministes, afro-féministes. Tout comme moi, elles sont poètes. Tout comme moi, elles disent leur poésie à haute voix. Tout comme moi, certaines disent leur poésie en musique, sons. Je me sens proche d’elles. Et elles représentent trois générations de luttes, quasi identiques ces luttes, ce qui dit le chemin qui reste encore à parcourir. Victoria Santa Cruz aurait pu être ma grand-mère, Nancy Morejón aurait pu être ma mère, Queen Nzinga Maxwell pourrait être ma sœur. Nous sommes toutes trois unies par nos combats de femme, par nos combats de femme noire ou métisse.
Victoria Santa Cruz (1922 – 2014), de son nom complet Victoria Eugenia Santa Cruz Gamarra, était une chorégraphe, compositrice et militante afro-péruvienne. Surnommée « la mère de la danse et du théâtre afro-péruviens », elle était une ardente défenseure de la culture noire péruvienne dans tous ses aspects.
Elle a créé de nombreuses œuvres théâtrales et compositions musicales, la plus emblématique étant certainement Me gritaron: ¡Negra! que j’ai eu l’honneur et la joie de traduire en français sous le titre Ils m’ont traitée de négresse. Lors du vernissage de l’expo, j’en ai proposé une interprétation en complicité avec Cesar-Octavio Santa Cruz (cajón) et Liz Barthel (chœur et gong).
Née en 1944 à La Havane, Nancy Morejón est une poétesse, dramaturge, essayiste et critique cubaine.
La thématique de la femme, et en particulier de la femme noire, à travers son corps, ses combats, est centrale dans son œuvre. Son poème le plus célèbre s’intitule Mujer Negra – à savoir Femme noire – et a fait l’objet de nombreuses traductions.
Née à San José au Costa Rica, Queen Nzinga Maxwell se décrit en ces termes : « Je suis une guerrière du ventre qui honore la royauté en ses veines, ses racines ancestrales et son héritage de révolution et de résistance. Empiriquement, je revendique le chant, l’écriture, l’Art Menstruel, la poésie Spoken Word et la poésie Dub en tant que choix pour mon expression artistique. » Également griote et prêtresse de la religion yoruba lukumi, ses poèmes célèbrent tout particulièrement la femme, les femmes, la féminité ; mais aussi les identités noires, afro-descendantes.
Photo : KLAC
Pourquoi avoir utilisé des cajones en carton ?
Le cajón est l’instrument roi de la musique afro-péruvienne. Objet utilitaire détourné par les esclaves auxquels on avait interdit les percussions, c’est un élément à la symbolique forte pour moi. Et le carton est un support dont j’apprécie particulièrement la texture et la couleur pour dessiner.
D’autre part, les femmes auxquelles ces cajones rendent hommage ont dit ou disent leur poésie à voix haute, parfois accompagnées de musiciens.
Et enfin, les représenter sur ces cajones, cela me permet, symboliquement, de faire résonner leurs voix.
Je reviendrai dans les prochains jours pour vous présenter le travail réalisé sur chacun des trois cajones, et à travers ces derniers, je vous parlerai plus longuement de chacune de ces femmes.
Mais n’hésitez pas à aller les voir directement au Zig Zag Café. D’autant plus que ce triptyque est particulièrement bien entouré par les œuvres de Liz Barthel, Noémie Boullier, Cesar-Octavio Santa Cruz et Ivan Torres. L’expo y est visible jusqu’au 28 novembre. Toutes les informations et le programme sont disponibles ici.