Il fait
goût de crame
relents de charbons ardents
Il fait
langue tapissée de cendres
narines pourléchées par feu
Il fait
poitrine encagée de pesanteur
sang serré en poing tenu en serres
Il fait
cocons coincés dans la gorge
empêchés d’essor empapillonné
Il fait
chemins qui s’étranglent
horizon qui se mord la queue
Il fait
détresse avariée
désespérance infectée
Il fait
paralysie des sens
anesthésie générale du sens
La furie est une fureur faisandée
Il fait
opportunités en vase clos
macération en ghettos sociaux
Il fait
des France qui se frôlent sans se fréquenter
La furie est une fureur faisandée
Il fait
Réveil en KO hébété dans l’ère
des enfants en déshérence
nés avant l’invention de l’espérance
des enfants perdus sans pays imaginaire
La furie est une fureur faisandée
Il fait
disproportion des émotions
démesure des mesures
La furie est une fureur faisandée
On ne naît pas émeutier on le devient
On ne naît pas raciste on le devient
On ne naît pas déviant on le devient
La furie est une fureur faisandée
Société, société,
tu n’as pas appris à tes enfants à s’aimer
Société, société,
qu’as-tu fait de tes enfants déboussolés ?
qu’as-tu fait de tes enfants qui perdent pied ?
qu’avons-nous fait à nos enfants entretués ?
La furie est une fureur qu’on a laissé faisander
Patricia Houéfa Grange
Tous droits réservés
Petite remarque : mon vers « La furie est une fureur faisandée » est librement inspiré de la citation suivante en anglais : « Rage is anger that has aged » du Dr Kenneth Hardy, thérapeute spécialisé en thérapies familiales, justice sociale et trauma racial.